Homélie pour le ­6ème dimanche du Temps Pascal ­|Année B |2024

Souvent, lorsque je célèbre l’eucharistie, au moment de l’élévation, je dis tout bas « rappelle-toi, Seigneur, que tu es mon ami. » Cela me fait penser que son amitié est fidèle, féconde et qu’il m’a choisi pour être son ami. C’est cela que nous voyons être déployé tout au long du chapitre 15 de saint Jean duquel est tiré l’évangile d’aujourd’hui.

Pour parler de cet amour qui va jusqu’à donner sa propre vie pour l’être aimé, Jésus prendra comme image l’amour d’amitié. Tout le discours de Jésus dans ce passage s’enracine dans cette parole : « je vous appelle mes amis. » C’est comme si Jésus leur disait « c’est parce que vous êtes mes amis que je vous donne ma vie ! » « C’est parce que vous êtes mes amis que je vous livre mon cœur. »  Il n’y a pas de sens de donner sa vie à des inconnus, mais lorsque notre cœur est rempli de cette amitié vraie, cet amour-là, déborde et va au-delà de tout.

Dans cet amour d’amitié il y a quelque chose de l’ordre de l’élection qui devient le fondement de toutes les relations : « c’est moi qui vous ai choisis », dira le Seigneur. Ce choix n’est pas un choix arbitraire. Et c’est parce qu’il y a choix et élection que nous pouvons être nous-mêmes, nous sentir à l’aise pour nous montrer tel que nous sommes face à l’ami qui nous aime. Nous sommes, là, au cœur de notre relation avec le Seigneur. Il nous choisi parce qu’il veut être notre ami, pour que nous soyons devant lui sans peur ni crainte mais avec confiance. Car il est ce véritable ami qui nous regarde sans juger, qui nous enseigne sans nous faire la morale, qui nous aime sans rien demander au retour ; et l’expérience de cette amitié ouvre notre propre cœur pour que nous ayons envie de devenir meilleurs car son amitié change notre vie. Cette expérience ouvre notre cœur pour que nous puissions entendre le commandement qui nous demande de nous aimer mutuellement.

Cette amitié à laquelle le Seigneur nous invite, est un don de l’Esprit qui nous fait prendre conscience de la nécessité de vivre cette relation privilégiée avec le Seigneur. C’est bien cela que nous voyons émerger dans la première lecture, l’accueil de l’Esprit qui mène à la demande du baptême, lieu de cette relation d’amitié avec le Christ. Cette relation qui va au-delà d’une relation de maître et serviteur. « Je ne vous appelle plus serviteurs car le serviteur ne sait pas ce qui fait son maître… » l’ami, si ! Elle est là, la nouvelle identité de l’amour de Dieu apportée par le Christ : celle de l’ami. Et de la même manière que le Seigneur nous donne la possibilité de nous présenter devant lui tel que nous sommes, à son tour, il se présente devant nous tel qu’il est : le Fils bien-aimé du Père. Cette relation entre le Père et le Fils est la base de la relation que nous pouvons avoir avec le Christ, à condition que nous demeurions dans son amour. Demeurer c’est prendre du temps, c’est apprendre à connaître l’autre et se laisser connaître par lui. Demeurer c’est prendre le temps pour devenir AMIS.

Apprenons à aimer d’un amour d’amitié, avec tout ce que le Christ nous donne d’entendre de cet amour. Et n’oublions pas que le Seigneur nous choisit chacun, personnellement, pour être son ami ! Rappelle-toi, Seigneur, que tu es notre ami !

« Rappelle-toi, Seigneur que tu es mon ami » lorsque je ne reste pas fidèle à notre amitié. Rappelle-toi que tu es mon ami lorsque ma foi vacille. Rappelle-toi que tu es mon ami lorsque je ne suis pas ton disciple. Rappelle-toi, Seigneur, que je suis ton ami lorsque mon cœur se sent seul, isolé, lorsque les amitiés d’ici-bas oublient ce trésor que tu nous as laissé.