Homélie pour la Solennité de la Pentecôte|Année C|2019

C’est presque déroutant que l’Evangile que nous venons d’entendre ne parle pas que de l’Esprit Saint. Jésus prépare le terrain pour pouvoir aborder la question de la venue du Défenseur. Et pourquoi ? Parce que l’Esprit Saint ne peut agir que dans un cœur qui se sait capable d’aimer. Car seul un cœur qui se sait capable d’aimer peut reconnaitre qu’il a besoin d’aide, qu’il a besoin d’apprendre, de grandir, de se déployer.

La fête de la Pentecôte est, pour chacun de nous, une occasion pour faire une introspection pour savoir comment nous nous laissons guider par l’Esprit Saint, comment nous accueillons l’amour de Dieu en nous. Par cette présence forte mais au même temps discrète et silencieuse. L’Esprit Saint est « avant tout, la présence spirituelle de Jésus Ressuscité dans l’Eglise.[1] » Il est l’âme de l’Eglise. « Sans lui, le Christ serait resté dans le passé, l’Evangile serait lettre morte, et l’Eglise, une simple organisation [2]» quelconque. Mais avec l’Esprit Saint, le Christ Ressuscité est présent, l’Evangile est force de Vie. Il n’y a que l’Esprit Saint qui peut sanctifier l’Eglise, comme nous l’avons dit dans la prière d’ouverture : « aujourd’hui, Seigneur, par le mystère de la Pentecôte, tu sanctifies ton Eglise… » Cette Eglise n’est pas un bâtiment ni une association de bénévoles, cette Eglise c’est nous, chacun de nous. La transformation de l’Eglise passe par la transformation de notre propre cœur. Ce n’est que par l’action de l’Esprit Saint que l’Eglise, donc, nous, peut se convertir. Et c’est par l’Esprit Saint que l’Eglise devient communion. Je sais bien qu’il nous est peut-être difficile d’entendre cela si nous nous tournons vers l’actualité de l’Eglise aujourd’hui. Mais c’est grâce au don de l’Esprit Saint que nous pouvons affirmer que, malgré les traversées du désert que l’Eglise peut vivre, grâce au don de l’Esprit Saint donné à chacun, nous pouvons entrer dans la confiance car nous savons que l’Eglise n’est pas une œuvre humaine, mais un désir du cœur même de Dieu. Et pourquoi parler de l’Eglise aujourd’hui ?

Parce que le don de l’Esprit Saint est fait à la communauté réunie. « Tous furent remplis d’Esprit Saint », nous dit la première lecture. Et cet Esprit de Dieu en nous, fait de nous de fils de Dieu. Il nous introduit, d’une manière toute particulière, dans l’intimité de Dieu. Car celui-ci n’est plus seulement au-dessus ou à côté de nous, il est en nous ! Et par le mystère de la Pentecôte, Dieu vient sanctifier chacun de nous, c’est-à-dire, nous rendre entiers, nous unifier intérieurement. Il vient donc, sanctifier l’Eglise.

Et c’est d’amour dont il s’agit le jour de la Pentecôte. Le don de l’Esprit Saint sur les apôtres et Marie réunies au Cénacle, c’est le don de l’effusion de l’amour de Dieu sur eux, ce don qui vient à la rencontre de leurs propres capacités à aimer. Et lorsque Jésus dit « si vous m’aimez, vous garderez mes commandements », il est en train de nous rappeler que l’amour pour Dieu et l’amour pour le prochain sont inexorablement unis. Cela va ensemble. Quel est le plus grand des commandements que le Christ nous a laissé ? N’est-ce pas aimer Dieu de tout son cœur et le prochain comme soi-même ? L’amour de Dieu et l’amour du prochain sont inséparables. Et l’action de l’Esprit Saint en nous vient nous rappeler justement cela. Et, aimer le prochain, passe par le don de soi, par le service. Comme Jésus nous l’a rappelé la nuit du jeudi saint. L’amour de Dieu nous est donné gratuitement, mais plus je me mets au service, plus je suis serviteur, plus cette amour prendra de la place dans mon cœur. Et c’est là l’antidote contre le mal qui nous accable. L’antidote contre les abus de pouvoir, qui est la racine de tous les abus. Se mettre au service. Et le faire avec le Christ.

Chers frères et sœurs, demandons-nous, honnêtement, quelle place nous laissons à Dieu dans notre vie ? Est-ce que nous nous laissons toucher pour être transformés par lui, ou voulons-nous créer un Dieu selon nos envies et nos désirs propres. Un Dieu à notre image et à notre ressemblance, en inversant les choses, car c’est nous qui sommes créés à son image et à sa ressemblance ?

Nous sommes disciples de Jésus. « Par le sacrement de baptême et de confirmation, notre capacité d’amour est habitée par l’amour même de Dieu.[3] » Mais pour que cet amour porte du fruit en nous, nous avons besoin de nous mettre devant Dieu, avec humilité et simplicité, et lui demander son aide.  Et il nous envoie le Défenseur. Ce défenseur qui nous défend de nous-mêmes. De notre tiédeur, de notre timidité spirituelle. Ce Défenseur qui nous défend de notre égocentrisme ou de nos envies d’avoir ce qu’appartient à l’autre. Ce défenseur qui nous aide à nous souvenir que l’amour de Dieu se manifeste par nos actes, nos paroles et nos gestes. Et que garder les paroles du Christ c’est se mettre en relation avec lui et avec ceux qu’il met sur notre route. Garder les paroles du Christ c’est se mettre au service ! Et ce n’est qu’ainsi que notre Eglise peut être transformée. Parce que nous nous laissons transformer. Pour qu’elle devienne, non ce dont j’ai envie qu’elle soit, mon Eglise à moi, mais pour qu’elle devienne la présence réelle de Dieu dans le monde.

« Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements… » et son commandement c’est que nous aimions Dieu et le prochain comme nous-mêmes. C’est dans un cœur qui reconnait sa capacité à aimer, que l’Esprit Saint de Dieu peut faire son œuvre ! Laissons donc, agir en nous, l’Esprit du Ressuscité ! Soyons disciples du Ressuscité !

(Ac 2, 1-11 ; Ps 103 ; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16.23b-26)