Homélies et autres réflexions
9 Avril 2020
Lorsque nous entendons ce passage d’évangile, nous sommes touchés par ce geste inouï que Jésus pose. Le maitre se lève de table, dépose ses vêtements, prend un tablier et lave les pieds de ses disciples. Mais ce geste ne serait rien s’il n’était pas accompagné de ce qui nous est dit tout au début : « Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. »
C’est l’amour de Jésus pour ses disciples, et donc, pour l’humanité, et donc, pour chacun de nous, qui lui a permis de s’abaisser et de poser ce geste. Un amour qui est capable de se donner jusqu’au bout ! Jusqu’à l’extrême. Et cela parce que Jésus se sait aimé, profondément aimé par son Père, qui « a tout remis entre ses mains. » Jésus ne sait qu’aimer et l’amour ne peut que se donner.
Et aujourd’hui encore, il se donne à chacun de nous. Il se donne pour que nous nous sachions aimés. Aimés même si nous ne nous sentons pas dignes. Aimés, même si nous avons l’impression que nous-mêmes nous ne savons pas aimer. Aimés, même si nous avons l’impression d’être seuls, ou encore, le sentiment de ne pas être aimés. Il se donne à chacun de nous pour que nous nous sachions aimés d’un amour infini ! Dieu t’aime d’un amour infini ! Et lorsque nous accueillons cet amour, notre vie est transformée et nous avons une plus grande envie de nous donner à notre tour. De nous déposséder de ce qui nous enferme parfois, nos petites certitudes, pour entrer dans la dynamique de l’amour de Dieu. C’est cela qui a été vécu par Pierre. Pour avoir part au geste du Christ, il a dû se déposséder de sa propre certitude. « Tu ne me laveras pas les pieds, non, jamais ! » Lui a dit Pierre. Comme pour dire à Jésus qu’il n’était pas à sa place, lui, Jésus. Que celui que leur a enseigné pendant 3 ans, fait des miracles, ressuscité des morts, multiplié le pain et changé l’eau en vin, ne pouvait pas poser un geste si bas, si pauvre, si ridicule… et Jésus rappelle à Pierre que la place de l’amour, c’est d’aimer ! Et Jésus se montre humble, petit, vulnérable. Comme il s’est présenté face aux mages venus d’orient, comme il se présentera cloué sur la croix. Et comme il se présente devant nous, dans l’Eucharistie. Pauvre, petit, vulnérable. Humble ! Pour nous rappeler que son amour nous accueille. Que son amour ose accueillir nos fragilités et nos propres vulnérabilités. Il aime aimer notre vulnérabilité car c’est grâce a elle qu’il peut nous transformer.
« Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. » C’est le cœur même de toute sa mission. Et le cœur de ce qu’il désire que nous vivions. Car aimer jusqu’au bout c’est être capable de donner sa propre vie. C’est être capable de se mettre au service. C’est accepter que notre chemin ne corresponde pas forcément à ce dont nous avons rêvé. Mais c’est accueillir notre vie en sachant que nous sommes profondément aimés, par un Dieu qui s’est fait égal à nous. Ce n’est que la certitude de cet amour qui nous permet d’avancer même si parfois nous avons l’impression d’être dans le brouillard.
Ce soir, nous aurions dû revivre ce même geste du lavement des pieds. Le confinement ne nous le permet pas. Mais voici une chaise vide. C’est pour chacun de nous ! Pour que nous puissions d’abord, nous laisser laver par le Christ. Laver de ce qui nous sépare de lui. Et nous savons bien ce qui peut nous séparer de Jésus. Nous laisser laver de tous qui nous enferme dans nos certitudes, comme Pierre, pour avoir part à la vie du Christ et entrer dans la dynamique d’un amour qui aime jusqu’au bout. Car, en nous laissons laver par Jésus, en acceptant humblement la Lumière de son amour, nous pouvons alors aimer ceux qui nous sont donnés à aimer. Aimer même ceux que nous avons décidés qui ne sont pas aimables. Et si nous nous croyons toujours incapables d’aimer, nous pouvons nous tourner vers le Seigneur qui nous aime, infiniment. Qui a donné sa vie pour nous. Et lui demander cette force qui vient de lui !
Chers frères et sœurs, n’ayons pas peur d’aimer, n’ayons pas peur de nous donner. D’aimer et de nous avec le Christ. Prions les uns pour les autres. Mettons-nous au service les uns des autres. Laissons que l’amour infini du Christ puisse vaincre nos égoïsmes et nos peurs et présentons-nous devant lui, tel que nous sommes. Pour qu’il vienne nous laver de tout ce qui nous empêche d’avancer sur notre chemin avec lui.
Et en avançant sur notre chemin de foi, notre prière deviendra action de grâce, elle deviendra eucharistie ! Car le propre de l’amour est de se donner. Et ce soir, le Seigneur se donne, encore une fois, à chacun de nous !
(Ex 12, 1-8.11-14 ; Ps 115 ; 1Cor 11, 23-26 ; Jn 13, 1-15)