22 Juin 2024
Nous sommes témoins, à la lecture de ces pages, des belles réflexions d’un évêque, nourries par son expérience, sur la question de l’accompagnement de ceux qui se sentent appelés au sacrement de l’ordre, et d’une invitation à revenir au cœur même de l’exercice du ministère presbytéral : le don de soi, à l’image du Christ, qui s’abaisse pour être au service, avec cette belle image du lavement des pieds comme acte fondateur de l’essence de ce don de soi.
L’ensemble des méditations nous fait un rappel de certaines évidences (peut être oubliées) liées au ministère presbytéral et nous présente des pistes de réflexions pour voir autrement, à la fois l’accompagnement des candidats au sacerdoce ministériel et l’exercice même du ministère. L’auteur nous partage ses belles intuitions sans vouloir donner une leçon, mais en nous invitant à quitter nos sentiers battus pour réfléchir ensemble à une nouvelle manière de devenir et d’être prêtre qui englobe davantage la question de la collaboration et de la coresponsabilité. Avec cette question de la gouvernance qui mérite d’être revisitée, approfondie et actualisée.
La question de l’accompagnement de chacun qui prend en compte davantage la personnalité des candidats, au lieu de vouloir qu'ils entrent dans un cadre parfaitement préétabli ; ou encore, l’excès de responsabilité et d’attente qui peut mener un ministre à être en difficulté dans l’accomplissement même de sa vocation, ce sont des questions pertinentes et intéressantes. La remise en cause de la tyrannie de la performance est essentielle.
Parmi quelques questions suscitées à la lecture de ces pages et qui ne sont pas directement abordées, retenons-en une: là où l’on parle souvent, et il est nécessaire de le faire, de la dignité et de la mission conférée par le sacrement du baptême et que celui-ci est supérieur à celui de l’ordre puisque ce deuxième est au service du premier, il nous manque peut-être une méditation/rappel de ce qu’est le sacrement de l’ordre, plus en profondeur. En quoi il rend l’homme baptisé qui l’a reçu « différent » des autres? Et s’il y a changement ontologique de la personne, est-ce uniquement pour l’abaissement, à l’image de celui du Christ, comme il est cité en page 15 ? Par ailleurs, sans une vraie compréhension du sacrement de l’ordre, comment comprendre et vivre la complémentarité avec le sacrement du baptême ? Comment la réflexion sur une nouvelle manière d’exercer le ministère presbytéral n’encourage pas à tomber dans un autre extrême, celui du « nous n’avons pas besoin des prêtres » effaçant ainsi la réalité de la grâce sacramentelle du sacrement de l’ordre.
Et enfin, tout ce qui est dit à propos de l’articulation entre le sacerdoce baptismal et ministériel, ne devrait-il pas avoir comme point de départ une rencontre vraie, personnelle et transformatrice avec le Christ ? Sans quoi la réflexion risque de rester sur un niveau plutôt idéologique et/ou revendicatif, alors qu’elle touche l’existence elle-même et la vie de la communauté ecclésiale tout entière ?
La lecture de ce petit ouvrage vaut vraiment la peine. C’est une belle méditation sur une réalité bien actuelle.
Le petit plus ce sont les reproductions des tableaux d'Arcabas, une belle manière d'entrer dans la contemplation.
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Prêtres à l'école du lavement des pieds.
Mgr Jean-Marc EYCHENNE
Ed Salvator. 2024. 72 pages.