27 Avril 2020
Depuis quelques semaines nous avons entendu reparler de cette pratique ancienne de l’Eglise. Le pape François a accordé l’indulgence plénière à deux reprises : le temps de prière extraordinaire du 27 mars et dans la bénédiction « urbi et orbi » du dimanche de Pâques. Certains réagissent mal où sont mal à l’aise face à cette pratique. Surtout par ce que nous avons connu par le passé, avec l’épisode de Luther.
Ce petit article ne vise pas à être un traité théologique sur les indulgences, mais en vue des questionnements de certains, nous allons essayer de répondre à la pertinence de cette pratique dans le temps que nous vivons, avec cette pandémie de Coronavirus. Nous traiterons plutôt du bien spirituel que nous pouvons trouver en entrant dans cette démarche.
Recevoir les indulgences est, avant tout, une pratique de piété. Dans ce que ce mot porte de plus noble : une relation sincère et filiale à Dieu. Cette pratique est liée intimement au sacrement de Pénitence et de Réconciliation. Elles ne sont donc pas un commerce du donnant-donnant ou pour remplir les cases, comme nous pouvons l’entendre.
Le mot indulgence vient du latin et veut dire « bienveillance », « bonté ». Quelqu’un d’indulgent est quelqu’un qui, même si l’autre lui a fait du mal, au moment où il y aura une demande de pardon, il ne tiendra pas rigueur des conséquences du mal commis. Ainsi il en va de même pour les indulgences. Elles sont une rémission de la peine temporelle due au péché.
Les indulgences ne peuvent être comprises que par l’éclairage de ce que nous appelons « le pouvoir des clés », par la communion des saints et enracinées dans le Christ. Faisons un tour rapide sur ces 3 réalités :
Le pouvoir des clés : dans Matthieu 16, 18-19 Jésus dit ceci à Pierre: « Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »
Cette parole fonde le sacrement de pénitence lui-même. C’est parce que le Christ a adressé cette parole à Pierre, et à tous les apôtres (cf Mt 18, 18 et Jn 20, 23), que nous pouvons recevoir, au nom du Christ, le pardon des péchés. Et nous savons qu’il ne s’agit pas seulement de demander pardon, mais il nous est nécessaire de manifester, par un acte concret, notre désir de ne plus recommencer et, si besoin, réparer ce que nous avons commis. Ceci n’est en rien du tout une pratique machiavélique pour nous faire entrer dans une culpabilité quelconque, c’est surtout une occasion que Dieu nous donne pour entrer dans une plus grande liberté et pour grandir dans la connaissance de soi, celle de l’autre et de Dieu, et dans l’école de la sainteté. La pratique des indulgences est intimement liée au sacrement de pénitence et de réconciliation. Elle ne le remplace pas, mais dans une période de confinement, elle nous permet de vivre, d’une manière particulière, de la miséricorde de Dieu.
La communion des saints : un sacrement, même si on le reçoit seul, s’inscrit dans la communauté ecclésiale. Tout geste sacramentel est un geste ecclésial. « Dans la communion des saints il existe donc entre les fidèles un constant lien d’amour et un abondant échange de tous biens. Dans cet échange admirable, la sainteté de l’un profite aux autres… » (Catéchisme de l’Eglise Catholique, 1475). Et cela parce que nous formons un seul et même corps. Avec l’Eglise pélerine que nous sommes et l’Eglise triomphante qui est déjà au ciel. Et si nous formons un même corps, « si un seul membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance ; si un membre est à l’honneur, tous partagent sa joie. » (1Cor 12, 26). La pratique des indulgences vient nous rappeler cette réalité de foi. Que nous sommes unis les uns aux autres et que ce lien nous permet d’avancer sur ce chemin de foi.
Enracinés dans le Christ : ce que nous vivons en Eglise ne peut porter des fruits que si c’est enraciné dans le Christ. C’est lui le principe et le but. C’est en lui que tout trouve un sens. C’est par lui que nous pouvons être unis les uns aux autres, car « il est aussi la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts… » Par sa passion, mort et résurrection, il a établi l’Alliance définitive entre Dieu et l’humanité. Et il veut que tous soient sauvés.
Dieu est le premier à être indulgent. Il est Bon, il est la Bonté même. Il est bienveillant. Nous pouvons considérer, tout d’abord, par ce biais-là, la pratique des indulgences. Le déversement à profusion de la bienveillance de Dieu sur son peuple dans un moment où celui-ci ne peut pas vivre sa pratique religieuse et ses rites religieux. Et dans la suite du pouvoir des clés que Jésus a donné à ses apôtres, l’Eglise, notre mère, veut que tous ses enfants puissent plonger dans l’amour infini de Dieu. Cet amour qui restaure, relève et redonne vie. Et telle une mère, elle veut prendre soin de ses enfants. Et nous inciter à entrer dans une démarche de charité, de pénitence et de prière. Autrement dit, par la charité, on aime. Par la pénitence, on entre dans une dimension de conversion. Et par la prière, nous entrons dans une dimension de relation. Les indulgences sont ainsi une manière d’entrer dans la dynamique d’amour du cœur de Dieu qui ne sait qu’aimer.
Le temps que nous traversons maintenant nous prive de la pratique sacramentelle, dont le sacrement de réconciliation. Ainsi, pratiquer les indulgences, c’est se mettre sous ce manteau de miséricorde que le Seigneur veut répandre sur l’humanité. C’est vivre, de manière intime et intense, la communion des saints. Nous pouvons vivre cette démarche pour nous-mêmes mais aussi pour quelqu’un d’autre, comme une prière d’intercession. Nous n’avons rien à perdre. Nous ne pouvons que grandir dans notre relation à Dieu, à l’autre et à nous-mêmes.
Vous avez dit : indulgence ? Par un acte concret, osons nous mettre sous le regard bienveillant de Dieu. Mettons-nous sous le manteau de sa miséricorde.
En pratique : Dans ce temps de confinement, la Pénitencerie apostolique, l’un des trois tribunaux de la Curie romaine, a publié le vendredi 20 mars un décret relatif au don des Indulgences. Par le lien suivant, vous pouvez consulter les dispositions nécessaires pour recevoir l’indulgence plénière en ce temps de pandémie du coronavirus: |